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Chercheur : Arnold Gesell (1880-1961)Chercheur : Gesell, Arnold (1880-1961)

Pourquoi pas la neurobio pour enfants?

Réfléchir sur le raisonnement et l’apprentissage à Montréal

On a souvent l’impression, en consultant des livres rapportant les stades de Piaget, que le stade des opérations formelles est le dernier stade de la pensée et que tout le monde finit par l’acquérir. Or il n’en est rien. Piaget lui-même en est venu à cette conclusion lorsqu’il constata au début des années 1970 qu’un pourcentage non négligeable d’adultes était incapable de résoudre certains problèmes propres au stade formel comme celui du pendule (voir encadré à droite sous le texte).

Quant au caractère indépassable du stade des opérations formelles, rien n’est moins sûr. Pour Piaget, il n’y avait pas de limites au développement humain. Par conséquent, il entrevoyait même des stades «d’opérations post-formelles» ou «d’opération à la puissance n» qui pourrait se retrouver chez des mathématiciens professionnels ou des spécialistes d’autres domaines où l’abstraction est à l’honneur.


On observe la même succession d’étape dans le développement postural et moteur chez tous les enfants : d’abord la maîtrise de la tête, suivie de celle de la position assise, puis de la position debout, et finalement de la marche.

En 1946, Arnold Gesell a montré que cette succession était orientée du haut du corps jusqu’au bas du corps (développement céphalo-caudal) et, pour chaque membre, des segments les plus proches de l’axe du corps aux plus éloignés (proximo-distal).

Il a aussi attiré l’attention sur le fait que ce phénomène était progressif puisque chaque étape impliquait un accroissement du contrôle du tonus musculaire et de la coordination des mouvements rendus possibles par la maturation du système nerveux.


« C’est par l’action que le nouveau-né construit son schéma corporel. Ainsi, lorsque sa main vient toucher son pied, les deux sensations, celle de la main et celle du pied, se referment sur lui, alors que si elle vient toucher son biberon ou le sein de sa mère, la sensation de la main s’ouvre sur le monde extérieur. Il lui faut dix-huit mois à deux ans pour se rendre compte qu’il est distinct du milieu qui l’entoure, qu’il est seul dans sa peau, jusqu’à la mort. »

- Henri Laborit,
La légende des comportements, p.93

LE DÉVELOPPEMENT COGNITIF SELON PIAGET
AU-DELÀ DU MODÈLE DE PIAGETLES PÉRIODES CRITIQUES

Les travaux de Jean Piaget sur le développement cognitif ont jeté les bases de cette discipline. Même si certaines de ses données ont par la suite été critiquées, il demeure le pionnier de l’expérimentation empirique avec les enfants et le fruit de son travail a considérablement influencé les pratiques d’enseignement.

Piaget utilise le terme « constructivisme » pour décrire son approche puisqu’il considère que l’acquisition des connaissances est un processus d’auto-construction continuel tout au long de la vie. Il parle aussi « d’interactionnisme » pour souligner l’interaction constante entre l’hérédité et l’environnement dans les processus de développement. Même si cela nous semble évident aujourd’hui, il faut se rappeler que durant une bonne partie de la carrière de Piaget, des approches mettant essentiellement l’emphase sur une maturation génétique à l’origine du développement de l’enfant (comme celle de Arnold Gesell), ou au contraire des approches purement behavioristes (comme celle de B.F. Skinner) étaient prises plus au sérieux que celle de Piaget.

Pour Piaget, la connaissance est ni plus ni moins qu’une fonction biologique qui prend la forme d’une structure cognitive singulière chez chaque individu. Cette structure émerge de l’action et se développe soit en assimilant les nouveautés à des schèmes déjà établis dans cette structure, soit en accommodant sa structure aux nouveautés qui ne s’y intègrent pas.

Dans la culture populaire, Piaget est surtout connu pour ses stades de développement. Mais c’est la structure cognitive qui est au coeur de la théorie piagécienne, et les quatre grands stades de développement qu’il a décrit n’étaient pour lui que des repères pour suivre l’évolution du développement cognitif des enfants.

De plus, des stades majeurs au-delà de ces quatre-là étaient possibles dans l’esprit de Piaget et chaque stade pouvait être subdivisé en sous-stades.

Ainsi, le premier après la naissance où la pensée se développe par l’action, le stade sensorimoteur, est subdivisé en plusieurs sous-stades. Celui des réflexes innés durant le premier mois : sucer, pleurer, tousser, gigoter, uriner, déféquer… Celui des réactions circulaires primaires, jusqu’à environ 4 mois, où l’enfant aime à répéter inlassablement les mêmes actions qui lui procure du plaisir, comme sucer son pouce. Puis c’est la période où l’enfant découvre qu’il est distinct du monde extérieur. Il répète alors des gestes accomplis au départ par hasard et qui lui ont apporté une certaine satisfaction. Autour d’un an, l’enfant prend conscience de relations de cause à effet et de la permanence des objets qu’il cherche dès qu’ils ont quitté son champ de vision. Entre 1 et 2 ans, l’enfant recherche maintenant activement la nouveauté par l’expérimentation. Il va par exemple frapper avec sa cuillère sur différentes choses pour en tirer différents sons. En approchant deux ans, l’enfant développe clairement des représentations mentales qui lui permettent par exemple d’imiter un geste déjà vu, de faire des combinaisons mentales simples, de « faire comme si » tel objet était telle chose, etc.

Lien : L'enfant de 0 à 3 ans

C’est en questionnant les enfants devant certains problèmes concrets que Piaget pouvait déterminer si telle ou telle compétence à l’intérieur d’un stade donné était atteinte. Si par exemple l’on verse le liquide qui se trouve dans un récipient large et peu élevé dans un autre récipient haut et étroit, l’enfant au stade pré-opératoire dira qu’il y a plus de liquide dans le second récipient parce que le niveau est plus haut, mais pas l’enfant au stade des opérations concrètes qui saura que c’est la même quantité de liquide qui a été conservée malgré les apparences.

Lien : l'enfant de 3-6 ans

La capacité de conservation, c’est-à-dire cette capacité générale qui permet à l’enfant de voir que la quantité demeure la même malgré le changement de l’apparence, devient aussi possible pour les longueurs ou les nombres. Aux alentours de 6 ou 7 ans, un enfant ne dira plus qu’il y a davantage de points bleus parce qu’il sont plus dispersés comme lorsqu’il était plus jeune.

La conservation de la substance survient généralement un peu plus tard. On présente par exemple à l'enfant trois boules de plasticine identiques que l’on transforme, sous ses yeux, l’une en galette et l’autre en plusieurs plus petites boules. Quand on lui demande s’il y a encore dans les boules transformées "la même chose" (la même quantité) l’enfant de moins de 7-8 ans répond par exemple qu’il y en a moins dans la galette car elle est plus fine que la boule. Passé cet âge, il ne se laisse plus leurrer par les apparences.

Il faut souvent attendre l’âge de 9-10 ans pour que la dernière conservation soit maîtrisée, celle de la superficie. À cet âge, l’enfant sait par exemple que des carrés regroupés n’occupent pas plus d’espace, même s’ils en ont l’air, que ces mêmes carrés séparés.

Lien : L'enfant de 6-12 ans

Voici enfin une tâche que les enfants encore au stade opératoire concret ne peuvent pas accomplir, mais qu’un adolescent au stade opératoire formel ou un adulte peut faire, avec un peu de temps et d’effort il est vrai. Vous avez devant vous 4 cartes portant une lettre au recto et un nombre au verso : s’il y a une voyelle sur un côté, alors il y a un chiffre pair de l’autre côté de cette carte. La tâche est la suivante : parmi les 4 cartes ci-dessous, lesquelles dois-je retourner pour dire si la règle s’applique à ces cartes ? (essayez de trouver avant de lire la réponse sous les cartes !)

La réponse est le E et le 7. En effet, comme le E doit absolument avoir un nombre pair de l’autre côté, on doit le vérifier. Quant au 7 qui est un chiffre impair, on doit s’assurer qu’il n’a pas de voyelle de l’autre côté, sinon la règle serait brisée. Comme la règle ne dit rien quant à ce qu’il doit y avoir à l’arrière d’une consonne comme le K, ni ne dit qu’un chiffre pair comme le 4 doit avoir une voyelle de l’autre côté, on n’est pas obligé de vérifier ces cartes !

Les enfants ne sont pas des récipients qu’il faudrait « remplir » de connaissances comme l’ont longtemps pensé les pédagogues avant Piaget. Au contraire, ce sont de véritable « petits scientifiques » qui sont constamment en train de créer et de tester leurs propres théories sur le monde.

Cela est d’autant plus vrai chez l’adolescent au stade des opérations formelles. Si par exemple vous lui demandez de trouver ce qui fait qu’un pendule oscille plus ou moins vite, il procédera probablement en essayant d’abord avec une longue corde et un poids léger au bout. Ensuite la même longueur de corde avec un poids plus lourd. Puis une corde plus courte avec un poids léger. Et finalement il essaiera la corde courte avec le poids lourd. Suite à ces observations, qui constituent en réalité une expérience scientifique simple, il déduira que plus la corde est courte, plus le pendule oscille vite, et que le poids au bout de la corde n’a aucune importance…

Pour Piaget, la science, comme l’organisation des connaissances d’une personne, est un outil pour mieux s’adapter à notre environnement. Les structures cognitives individuelles, comme les théories scientifiques, sont le fruit de chercheurs actifs qui modifient constamment leur mode de pensée pour l’ajuster aux contraintes de l’expérience.


       
Liens
Lien : Children's needs: Dr. Stanley GreenspanLien : The Needs of ChildrenLien : Emotional Origins Of IntelligenceLien : The Importance of One-on-One Time
Lien : Floor Time: The Developmental, Individual Difference, Relationship-based Model for InterventionLien : Livres pour les parents : « L'esprit qui apprend : affectivité et intelligence », Stanley Greenspan, Paris, Odile Jacob, 1998.Lien : Nonconceptual Mental ContentLien : Le déterminisme biologique et social du concept d'intelligence LA SIGNIFICATION ÉVOLUTIVE DE L'INTELLIGENCE HUMAINE
Capsules originales
Expérience : Pannes d'émotions, pannes de décisionsPannes d'émotions, pannes de décisions
Outil : La résilience La résilience

Des expériences ont été réalisées en filmant des images d'une échographie dans les dernières semaines de la grossesse. On demande d'abord à la femme d'observer trois minutes de silence, puis de chanter une chanson. Instantanément, on voit que le bébé, dont le cœur s'accélère, se met à bouger. En comparant de nombreux enregistrements, on a pu constater que la gamme des réactions des bébés est très diversifiée, allant du vif à l'indolent.

Une mélodie ayant inévitablement une teneur émotionnelle particulière, il semble donc que l'interaction avec les émotions de la mère commence déjà à façonner le tempérament d'un individu avant même sa naissance.

Les représentations d'images dans l'esprit de la mère peuvent aussi provoquer des manifestations somatiques qui ont des répercussions sur le fœtus. On sait par exemple que des petites molécules générées par le stress passent à travers le filtre du placenta et auront une influence sur les stades ultérieurs du développement.


AU-DELÀ DU MODÈLE DE PIAGET
LE DÉVELOPPEMENT COGNITIF SELON PIAGETLES PÉRIODES CRITIQUES

De nombreuses critiques ont été formulées à l’endroit de Piaget et de sa conception du développement de l’enfant. Si certains, comme Vygotsky, ont mis l’accent sur le milieu social comme principal moteur du développement cognitif, d’autres ont voulu attirer l’attention sur l’importance de l’affectivité dans le développement harmonieux du psychisme humain.

C’est le cas par exemple de Stanley Greenspan qui, à partir de son expérience auprès d’enfants autistes, croit que l’intelligence est structurée par l’expérience affective. Pour lui, les émotions jouent un rôle central dans l’apprentissage de nos facultés intellectuelles, contrairement à la conception classique du développement de la pensée qui dissocie émotion et raison (voir capsule expérience à gauche).

Il s’agit donc d’une vision du développement dont l’essence va à l’encontre de celle de Piaget et qui pousse encore plus loin que Freud le poids des expériences émotives précoces dans le développement de nos facultés intellectuelles et sociales.


De quoi a donc besoin l’enfant pour bien se développer selon Greenspan ? D’abord d'un environnement sûr et sécurisant où il peut développer une relation avec un adulte stable et protecteur. Ces interactions riches et continues qui commencent dès le début de la vie pourront ensuite devenir de plus en plus complexes et subtiles. L’enfant pourra alors expérimenter, trouver des solutions, prendre des risques, échouer, rechercher autre chose. Tout cela à l’intérieur de limites et de structures clairement établies par les adultes.

Le mode d’intervention que privilégie Greenspan auprès des enfants est celui du « temps au sol » (« floor time », en anglais), c’est-à-dire le temps que l’on passe par terre à suivre l’enfant dans ses jeux. L’idée centrale est ici de partir de ce que l’enfant initie et de chercher à introduire dans cette activité une interaction affective.

Si par exemple un parent et son enfant se mettent à aligner alternativement des blocs sur le sol, l’enfant comprend la routine et attend que le parent mette son bloc avant de mettre le sien. Si le parent met alors deux blocs de suite, ou s’il met son bloc à un mauvais endroit, l’enfant voudra corriger l’erreur, ce qui permet « d’ouvrir et de fermer un cercle de communication », pour employer les termes de Greenspan.


Les affects, loin de constituer un obstacle à la logique et à la clarté de pensée, constitue donc ici la «colle» qui lie tous les aspects du développement intellectuel et social. En fait, les concepts abstraits sont souvent des catégorisations provenant d’expériences émotionnelles dans le monde réel.

Si l’on prend le concept mathématique de quantité par exemple, il viendrait à l’enfant d’une part par l’expérience de la sensation de « beaucoup » qu’il apprend lorsqu’il reçoit davantage que ce à quoi il s’attendait, et d’autre part de la sensation de « peu » qu’il ressent lorsqu’il obtient moins que ce qu’il voudrait. Le concept de quantité serait donc assimilé en fonction des attentes avec une forte connotation affective. Plus tard, l’enfant pourra systématiser ces expériences avec les nombres, de sorte que 10 devient « beaucoup » et 2 « peu ». Ainsi la compréhension des mathématiques, aussi froide et logique soit-elle, s’appuie sur des nombres dont l’apprentissage s’enracinerait dans l’affect.

Ce principe s’étendrait selon Greenspan à des concepts encore plus abstraits comme la justice par exemple. Un futur juge devra étudier les lois par lesquelles sa société codifie ce concept, mais sa connaissance intime de ce que signifie la justice lui viendra de sa vie personnelle et de son expérience d’avoir été traité de manière équitable ou injuste.

Dans le modèle de Greenspan, il est donc primordial que l’enfant développe le sentiment de son individualité. C’est à travers cette sensation d’être lui-même et pas une autre personne que l’enfant devient capable de désirer et d’avoir des intentions. Il convient donc de favoriser par tous les moyens ce qui amène l’enfant à construire ce sentiment de sa propre personnalité.


La contribution du psychologue Erik Erikson à la psychologie du développement met aussi l’accent sur le développement harmonieux du sentiment d’identité personnelle. Contrairement à Freud pour qui l’essentiel de notre personnalité est structurée à l’âge de cinq ans et à Piaget pour qui le stade des opérations formelles atteint à l’adolescence correspond en gros au mode de raisonnement que l’on conserve toute notre vie, Erikson affirme que la personnalité continue de se développer tout au long de notre vie. Il distingue en cela 8 stades de développement psychologique où prédomine dans chacun une crise psychologique particulière déclenchée par un type d’interaction dominant avec l’environnement social.

Lien : Erik Erikson : Socioemotional DevelopmentChercheur : Erik Erikson

 

    
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Lien : Child care providers : how brains develop in young childrenLien : ENCYCLOPEDIE SUR LE DEVELOPPEMENT DES JEUNES ENFANTS
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Expérience : L'effet d'un environnement enrichi sur la mémoireL'effet d'un environnement enrichi sur la mémoire

Le phénomène de résilience permet à certains enfants abusés ou traumatisés par des atrocités historiques de se développer normalement par la suite, et même d’être mieux équipés que les autres pour faire face à l’adversité. Les enfants résilients sont souvent ceux qui ont acquis la «confiance primitive» entre 0 et 12 mois et qui gardent par la suite l’espoir de rencontrer quelqu’un qui les aidera à reprendre leur développement.

La résilience est un phénomène complexe où les forces biologiques développementales s'articulent avec le contexte social pour créer une représentation de soi qui permet au sujet de se forger une histoire porteuse de sens.


Parce que les différents systèmes du cerveau ne deviennent pas tous matures en même temps, les périodes critiques sont différentes pour différentes fonctions cérébrales. La période critique de chacune de ces fonctions constitue un moment de vulnérabilité au cours duquel l’individu est très sensible aux influences de l’environnement, incluant les expériences traumatisantes. Par conséquent, les traumas subis durant l’enfance peuvent influencer de façon permanente l’organisation mentale de la personne.

Lien : Violence and Childhood: How Persisting Fear Can Alter the Developing Child's BrainOutil : La résilience
LES PÉRIODES CRITIQUES
LE DÉVELOPPEMENT COGNITIF SELON PIAGETAU-DELÀ DU MODÈLE DE PIAGET

Durant les premières années de la vie, l’influence de l’environnement sur le développement est cruciale. Les changements les plus prononcés induits par l'environnement surviennent durant des fenêtres temporelles appelées périodes critiques.

Les périodes critiques ont toutes en commun certaines propriétés fondamentales. Elles comprennent tout d’abord une fenêtre temporelle durant laquelle un comportement donné manifeste une grande sensibilité à des influences environnementales spécifiques. Ces influences sont même nécessaires au développement normal du comportement en question. Quand la période critique est terminée, le comportement n’est plus affecté de façon significative par la présence ou l’absence des stimuli environnementaux. Le corollaire de ceci étant que le défaut d’exposition aux stimuli appropriés durant la période critique est difficile voire impossible à compenser ultérieurement.

De nombreuses périodes critiques ont été décelées dans le développement des comportements de plusieurs espèces. La présence d’une période critique ne signifie pas pour autant que l’expérience n’a plus par la suite d’effets sur le développement cérébral subséquent. Seulement que certains grands réarrangement deviennent alors plus difficiles, voire impossibles, parce que des modifications irréversibles ont eu lieu au niveau synaptique.

Une personne privée de l’usage d’un sens durant une certaine période au début de sa vie peut ainsi avoir par la suite des lacunes permanentes au niveau de ce sens si elle en retrouve l’usage. Certains enfants nés avec des cataractes les empêchant de voir ont pu se faire enlever leur cataracte entre l’âge de 10 et 20 ans et, bien qu’ils aient pu par la suite percevoir les couleurs, ils ont toujours eu une grande difficulté à distinguer les formes.

Expérience: Effets de la privation visuelle durant la période critique du développement de la vision

 

La privation affective et la maltraitance des enfants durant certaines périodes de leur développement peuvent aussi avoir des répercussions irréversibles sur l’équilibre affectif du futur adulte. Les trois premières années de la vie sont considérées par plusieurs comme une période critique en ce qui concerne les voies neuronales impliquées dans la formation des liens socio-affectifs. Si l’enfant est exposé à des expériences négatives répétées durant cette période, il se peut que son équilibre socio-affectif demeure fragile pour tout le reste de sa vie et que cette personne soit sujette à des épisodes d’anxiété ou de dépression.

Histoire : L’isolation et ses effets dévastateurs sur le comportement social.

 

De nombreux travaux ont montré que ces troubles de l’humeur s’accompagnent d’une hyperactivité de l’axe hypothalamo-hypophysio-surrénalien (HPA). Celui-ci est directement impliqué dans le contrôle du stress : les taux sanguin de cortisol, comme ceux de CRH au niveau du liquide céphalo-rachidien, sont élevés chez les patients sévèrement déprimés.

Or il a été démontré chez le rat que l’expérience sensorielle précoce au cours du développement régule l’expression des gènes qui expriment les récepteurs aux glucocorticoïdes. Les jeunes rats qui reçoivent des soins maternels attentifs expriment plus de récepteurs de ce type dans l’hippocampe et moins de récepteurs au CRH dans l’hypothalamus. Résultat : ces rats montreraient plus tard une anxiété relativement faible lorsqu’ils deviennent adultes.

Ceci s’explique par le fait que l’activation des récepteurs aux glucocorticoïdes de l’hippocampe par le cortisol a un effet de rétroaction négative sur l’activité de l’axe hypothalamo-hypophysio-surrénalien. Chez les personnes ayant subi des carences affectives durant la période critique des trois premières années, cette boucle de régulation est perturbée, ce qui explique l’hyperfonctionnement de cet axe neuro-endocrinien et le stress chronique qui lui est associé.









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