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Outil : La grammaire universelle de ChomskyLa grammaire universelle de Chomsky

La spécificité du langage humain

On utilise les [ ] pour la notation phonétique et les / / pour la notation phonologique. On écrira par exemple en français [ta] et /ta/ respectivement pour la description phonétique et phonologique du mot "tas". De même, on écrira [ka] et /ka/ pour le morphème "cas". Il s'agit ici d'un exemple de ce qu'on appelle une opposition ou une paire minimale. Ces deux morphèmes sont reconnus comme différents en français, mais pourraient être perçus comme identiques dans une autre langue, notamment en tahitien.

« Dès l’instant où un être vivant a une mémoire et un projet, il peut donner sens à ce qu’il perçoit. Le sens n’est donc pas dans les choses. Il est dans l’être vivant qui se sert des choses pour les imprégner d’un sens. »

« Lorsqu’on met en lumière un morceau de monde, on éteint tout ce que l’on n’a pas mis en lumière. C’est ainsi que l’on crée ce qu’on dit : parler c’est créer un morceau de monde, c’est le pétrir, le fabriquer et le faire vivre.»

- Boris Cyrulnik


Le contenu d’un message parlé dépend autant de la signification factuelle du mot, de la prosodie (ou intonation), que des codes non-linguistiques comme les mouvements du corps, ceux des mains, etc. On n’a qu’à penser aux mimes qui parviennent à communiquer uniquement avec ces codes non-linguistiques.

Voilà pourquoi une phrase entendue au téléphone sera moins riche de sens que la même phrase dite par quelqu’un qui est devant nous. Et voilà aussi pourquoi la même phrase écrite aura encore moins de sens possible que celle entendue au téléphone. D’où les nombreux «smiley» des communications électroniques qui tentent de réintroduire la dimension prosodique de la communication.


Certains sons semblables mais distincts peuvent être identifiés par le cerveau
comme un même phonème. Par exemple, un énoncé comme " il tire la langue " prononcé avec un [r] roulé ou un [r] non roulé (les crochets désignent un son particulier) ne présente aucune différence phonologique en français. Deux sons différents, le [r] roulé et le [r] non roulé, représentent donc ici le même phonème /r/ (on dit que ce sont des variantes libres).

LES LIENS ENTRE PENSÉE ET LANGAGE
APPRENDRE UNE LANGUELES TROUBLES DU LANGAGE

La capacité du cerveau à reconnaître des mots particuliers dans le flot verbal de quelqu’un est remarquable. Il suffit d’écouter une langue qui nous est complètement étrangère pour se rendre compte de la difficulté d’en isoler les éléments constitutifs. Une personne qui parle dans sa langue n’isole donc pas les mots (appelés morphèmes par la plupart des linguistes) entre des silences, comme les espaces qui séparent les mots écrits. Et pourtant, notre cerveau les reconnaît individuellement.

Pour reconnaître les mots par leur son, le cerveau les décortique en phonèmes. On distingue ici deux approches, historiquement liées, mais qui n'ont pas le même intérêt pour la compréhension du cerveau.

D'abord la phonétique, qui décrit et classe les sons de tous les langages en se basant sur la manière dont ils sont produits physiquement grâce à nos organes phonateurs. Les descriptions phonétiques sont représentées entre crochets: [ ] (voir le premier encadré à gauche pour un exemple). La phonétique permet par exemple de comparer l'utilisation des différents sons dans différentes langues, et aussi dans de nombreux cas de décrire l'évolution sonore des langues.

Pour sa part, la phonologie, historiquement issue de la phonétique, ne s'attache pas à décrire les sons avec autant de précision que cette dernière. Par contre, elle révèle la structure interne propre à une langue particulière. Ce n'est pas le son en soi qui importe ici, mais l'opposition avec d'autres sons du même " tableau " typique de telle ou telle langue. Les descriptions phonologiques sont représentées entre des barres obliques: / / (voir le premier encadré à gauche pour un exemple). C'est donc l'analyse phonologique qui permet d'étudier les bases cérébrales du codage/décodage linguistique avec des mots, des phrases et des significations dans une langue donnée.

Car la fonction ultime du langage est de transmettre de la signification. Une fois que l’on a reconnu un mot par ses phonèmes, son sens va dépendre de plusieurs facteurs : ce qu’il désigne dans le monde, le contexte de son élocution et, surtout, de la façon dont le mot s’articule avec ses voisins dans une phrase, ce qu’on appelle la syntaxe.

L’ordre des mots dans une phrase revêt une importance capitale. Les phrases « L’homme mange l’alligator » et « L’alligator mange l’homme » ont des sens bien différent. Elles contiennent pourtant les mêmes mots. Seul l’ordre, et donc la relation qu’ils entretiennent par rapport au verbe, a changé.

Dans chaque langue, certains mots ne désignent rien en eux-mêmes, mais ont une fonction syntaxique dans la chaîne de mot que constitue une phrase. Ces mots « relationnels » comme et, le, un, avec montrent bien leur utilité lorsqu’ils viennent à manquer. C’est le cas des titres de journaux ou des petites annonces où l’espace est restreint : «Chien à donner. Mange de tout adore les enfants.», «Vends armoire pour dames aux pattes courbées», etc.

Le linguiste Noam Chomsky a montré l'importance de la syntaxe dans les langues naturelles. Sa fameuse phrase « Colorless green ideas sleep furiously » (en français, « Les idées vertes incolores dorment furieusement. ») n’a évidemment pas de sens, mais sa syntaxe correcte nous porte à en chercher un. Ce genre d'observation a amené Chomsky à formuler sa théorie de la "grammaire universelle" (voir capsule outil à gauche) où la syntaxe est indépendante de la signification, du contexte, des connaissances mémorisées par le sujet ou de ce qu'il veut communiquer. Une approche que contestent toutefois des linguistes comme George Lakoff qui placent plutôt la métaphore conceptuelle issue de nos expériences corporelles au cœur du langage.

Quoi qu'il en soit, les mots que nous connaissons forment un lexique mental où chaque mot peut évoquer plusieurs significations selon le contexte de son énonciation. Quand nous parlons, chaque mot est ainsi relié à plusieurs autres mots avec qui il partage des liens de sens. C’est ce qui permet au cerveau de construire des catégories.

 

La catégorisation est l’un des aspects les plus importants du langage. Sans cette capacité que nous avons de regrouper des objets similaires dans des catégories, le langage serait une suite infinie de noms désignant des objets particuliers. Aussi bien dire qu’il serait inutilisable.

La catégorisation permet surtout de créer des concepts, c’est-à-dire des représentations mentales générales et abstraites. Et grâce aux concepts, le langage devient un outil qui permet d’étendre nos capacités cognitives pour ensuite s’en servir pour mieux comprendre le monde.


 

Plusieurs expériences montrent que le langage permet cette transformation de l’information en représentations abstraites. Si par exemple on fait entendre à des sujets plusieurs phrases formant le paragraphe d’un texte, la plupart vont être capable de formuler l’idée générale dans leurs mots, mais pas selon les phrases exactes qu’ils ont entendues. C’est comme si deux transformations avaient lieu : une première nous permet de nous représenter de manière plus abstraite et synthétique ce que nous entendons, ce qui semble plus facile à mémoriser. Et une deuxième transformation où la personne se rappelle la représentation et la reconvertit en paroles en utilisant ses propres mots.

La question de savoir si la signification d’un mot et les caractéristiques de l’objet correspondant dans le monde sont emmagasinées au même endroit dans le cerveau est encore débattue. Certains pensent qu’il y a un site de stockage unique pour chaque concept, idée ou objet particulier. Toutes les caractéristiques d’un lion seraient par exemple emmagasinées ensemble dans une région du cerveau. La forme sonore et la forme écrite du mot lion seraient stockées dans d’autres régions qui seraient connectées à celle des caractéristiques de l’animal.

Pour d’autres, l’information est traitée dans le cerveau de façon beaucoup plus distribuée: l’odeur, le cri et l’image visuelle du lion seraient alors plutôt localisés en de multiples zones du cerveau étroitement interconnectées. Le fait d’entendre ou de lire le mot lion activerait alors simultanément l’ensemble de ces zones.

Outre son rôle fondamental dans la communication, le langage nous procure aussi un puissant mécanisme interne pour se remémorer, critiquer et modifier nos pensées. Ce mode de communication interne rend possible des manipulations mentales plus complexes, tant sur le plan logique que sur le plan affectif. Et la prédiction des conséquences de ces manipulations conceptuelles procure un avantage adaptatif certain à une espèce sociale comme la nôtre.

 



Les travaux d’imagerie cérébrale ont démontré que, dans le cerveau, le langage est organisé par catégories sémantiques et non par mots.

Par exemple si l’on demande à des sujets de nommer des personnes, des animaux ou des outils, on observe une augmentation d’activité dans des régions distinctes du cortex temporal.

Cette organisation permet aussi de comprendre pourquoi des lésions relativement restreintes dans le lobe temporal gauche entraînent parfois la perte des mots qui désignent une catégorie d’objets particulière et pas les autres.

    
Liens
Lien : A Theory of Neurolinguistic DevelopmentLien : ÉPIGENÈSE NEURONALE DU SIGNE LINGUISTIQUELien : New Lessons in How Brain Acquires Language Offered at SeminarLien : THE LEFT CEREBRAL HEMISPHERE, LANGUAGE & THOUGHT
Lien : Imagerie cérébrale du langageLien : Imagerie c´er´ebrale du bilinguisme et de l'apprentissage des languesLien : MODÈLES COGNITIFS ISSUS DE L’ANALYSE DE
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Outil : La grammaire universelle de ChomskyLa grammaire universelle de Chomsky
 Expérience : Les tentatives d'apprendre un langage aux primates Les tentatives d'apprendre un langage aux primates
Outil: Différents types de bilinguisme Différents types de bilinguisme

Quand l’austérité entrave le développement normal du cerveau

À un an, le lobe temporal qui inclut l’aire de Wernicke est encore très immature et représente à peine plus de 50% de la surface du lobe temporal adulte. De plus, sa partie centrale qui, chez l’adulte, est associée au stockage lexical, a à peine 20% de sa taille adulte. Même chose pour le lobule pariétal inférieur, relié à l’aire de Wernicke, qui permet d’assigner des mots à des événements visuels, sonores ou somatosensoriels : ses neurones sont relativement peu myélinisés durant la première année et sa surface est moins de 40% de celle de l’adulte.

À environ 20 mois, âge auquel l’enfant peut dire presque 100 mots et en comprendre le double, la surface du lobe temporal est passée à environ 65% de celle de l’adulte. À 30 mois, alors qu’il maîtrise environ 500 mots, son lobe temporal est à 85 % de celui de l’adulte. La maturation de l’aire de Wernicke semble donc être un facteur favorisant les capacités lexicales de l’enfant.

Lien : Bases cérébrales de l’acquisition du langage : apport de la neuro-imagerie

La mémoire procédurale pour le langage repose sur l’intégrité du cervelet, du striatum et d’autres ganglions de la base ainsi que sur une région circonscrite du cortex périsylvian gauche. Les compétences linguistiques implicites feraient également appel au système limbique qui règle nos émotions et nos motivations.

La mémoire déclarative repose pour sa part sur l’intégrité de l’hippocampe, du lobe temporal médian, et de grandes régions du cortex associatif des deux hémisphères.


Le phénomène neuronal du seuil d’activation, qui n’est associé à aucun système cérébral particulier mais touche toutes les fonctions supérieures, influence les compétences linguistiques. Le substrat neuronal de quelque représentation que ce soit requiert en effet une certaine fréquence d’influx nerveux pour atteindre son seuil d’activation, c’est-à-dire générer lui aussi des potentiels d’action. Chaque fois qu’un mot ou une construction syntaxique est utilisée, son seuil d’activation s’en trouve abaissé et son utilisation subséquente facilitée. Inversement, lorsqu’un circuit neuronal est inactif, son seuil d’activation s’élève graduellement. Les mêmes effets s’observent d’ailleurs au niveau moléculaire sur deux phénomènes qui jouent sur le seuil d’activation, la PLT et la DLT.

 

APPRENDRE UNE LANGUE
LES LIENS ENTRE PENSÉE ET LANGAGELES TROUBLES DU LANGAGE

Le langage humain est tellement sophistiqué qu’on doit admettre qu’une machinerie cérébrale en partie pré-programmée le rend possible, comme l’ont montré notamment les travaux du linguiste Noam Chomsky (voir capsule outil à gauche). Les bébés naissent ainsi avec un dispositif d’acquisition du langage qui leur permet en quelques années de maîtriser des milliers de mots et des règles de grammaire complexes. Ce qui n’est pas le cas de nos cousins primates les plus proches qui n’ont jamais réussi à apprendre plus que quelques centaines de symboles et quelques phrases simples (voir capsule expérience à gauche).

Ceci dit, l’enfant de moins d’un an ne peut émettre autre chose que du babillage. Cette limite serait attribuable à l’immaturité du lobe temporal qui inclut l’aire de Wernicke. Celle-ci, en associant les mots à leur sens, intervient directement dans la mémorisation des signes utilisés dans le langage. L’acquisition du vocabulaire durant les premières années semble suivre de près la maturation de cette région cérébrale qui, chez l’adulte, nous permet d’avoir un lexique de 50 000 à 100 000 mots.

Notre capacité à retenir un nombre aussi impressionnant de mots fait appel à deux types de mémoire selon qu’il s’agisse de notre langue maternelle ou d’une langue seconde apprise plus tard (voir capsule outil à gauche).

L’acquisition de la langue maternelle sollicite la mémoire procédurale, la même qui est impliquée dans l’acquisition d’habiletés comme rouler à bicyclette ou lacer ses chaussures. La langue maternelle finit elle aussi par devenir automatique, sans même que l’on ne prenne conscience des règles qui la structurent, simplement à force de baigner dedans.

 

Au contraire, l’apprentissage d’une langue seconde s’effectue par un effort conscient de mise en mémoire du vocabulaire et des règles de cette langue. Lorsqu’elle est apprise ainsi, une langue seconde dépendra de la mémoire déclarative. Il arrive toutefois qu’une langue seconde soit apprise «dans la rue», comme la première, sans qu’on lui porte une attention particulière. Auquel cas, elle sera elle aussi prise en charge par la mémoire procédurale.

En fait, plus la méthode d’enseignement d’une langue seconde sera basée sur la communication et la pratique, plus cette seconde langue utilisera la mémoire procédurale. À l’inverse, plus la méthode va être formelle et systématique, plus la pratique de cette seconde langue dépendra de la mémoire déclarative (ou explicite).


 

L’acquisition et l’utilisation d’une langue peuvent donc faire appel à des compétences linguistiques implicites comme à des connaissances métalinguistiques explicites. Comme différentes structures cérébrales sous-tendent chacun de ces systèmes (voir encadré), des troubles du langage peuvent affecter sélectivement la langue maternelle et les langues secondes. À la suite d’une lésion cérébrale, les personnes bilingues peuvent ainsi perdre de façon sélective l’usage d’une de leurs deux langues. Mais la langue préservée n’est pas nécessairement la langue maternelle, ni celle qu’ils parlaient le plus couramment avant l’accident.

Une lésion cérébrale peut également rendre une personne amnésique sans affecter sa capacité de parler sa langue maternelle (mémoire procédurale). Ou à l’inverse, une autre lésion pourra causer de sérieux problèmes d’utilisation automatique de la parole, mais ne pas affecter sa capacité à se remémorer ce que la personne a appris consciemment (mémoire déclarative). D’autres observations vont aussi dans le sens de cette distinction. Par exemple, certains patients aphasiques semblent récupérer leur langue seconde avec plus de succès que leur langue maternelle, alors que des patients amnésique perdent complètement accès à leur langue seconde. Les patients souffrant de la "maladie d’Alzheimer" conservent pour leur part les fonctions linguistiques basées sur la mémoire procédurale mais perdent celles liées à la mémoire déclarative comme le vocabulaire.

Mais même dans la langue maternelle, ce ne sont pas tous les aspects qui font appel à la mémoire procédurale. On croit par exemple que le lexique de notre langue maternelle, qui consiste en une association d’un ou de plusieurs phonèmes à une signification, pourrait entretenir des liens étroits avec la mémoire déclarative. Le vocabulaire semble donc constituer un aspect particulier du langage : les grands singes sont capables d’apprendre un grand nombre de symboles se rapportant à des mots (voir capsule expérience à gauche); les enfants sauvages privés de langage au début de leur vie peuvent aussi apprendre de nombreux mots, mais comparativement peu de syntaxe; et les individus atteints d’amnésie antérograde, bien qu’ils soient capables d’acquérir de nouvelles capacités motrices ou cognitives, sont pour leur part incapables d’apprendre de nouveaux mots.

Si le lexique de notre langue maternelle dépend d’une mémoire déclarative faisant intervenir les lobes pariétaux et temporaux, la grammaire de cette même langue fait bel et bien appel à une mémoire procédurale impliquant les lobes frontaux et les ganglions de la base. Cette mémoire procédurale est impliquée dans des apprentissages moteurs ou cognitifs inconscients qui impliquent une séquence d’événement dans le temps. Ceci correspond bien aux opérations grammaticales qui consistent à ordonner en temps réel les éléments lexicaux d’une langue.



L’aire de Broca, ainsi que les aires motrices supplémentaires et prémotrices de l’hémisphère gauche, qui participent toutes à la préparation du langage, sont activées lorsqu’on se répète mentalement quelque chose sans le prononcer. Ceci permettrait d’augmenter le temps de maintien en mémoire de l’information verbale en rafraîchissant le "buffer phonologique". Ces régions frontales gauches sont ainsi impliquées dans le maintien actif de l'information dans la mémoire de travail.

Certaines études faites sur des enfants ayant des problèmes de lecture ont montré que ceux-ci avaient en fait des problèmes de compréhension de la syntaxe causés par une déficience de leur mémoire de travail.

C’est aussi la mémoire de travail qui nous permet de comprendre des phrases particulièrement longue ou complexe comme par exemple: “Le clown qui porte le petit garçon embrasse la petite fille”. Ce que la mémoire de travail permet, c’est de garder l’information verbale à l’esprit suffisamment longtemps pour que la séquence de mots d’une phrase prenne sens.




L'interprétation simultanée est la tâche verbale peut-être la plus complexe que l’on peut imaginer. En traduisant un discours simultanément, un interprète doit comprendre ce qui est exprimé dans une langue, le garder dans sa mémoire de travail jusqu’à ce qu’il l’ait encodé dans l’autre langue, puis prononcer ce bout de discours dans l’autre langue, tout en continuant de se concentrer sur ce que dit le locuteur dans le première langue et recommencer le processus.

Lien : FIVE PRINCIPLES AND FIVE SKILLS FOR TRAINING INTERPRETERS
    
Liens
Lien : MODULARITY, DOMAIN SPECIFICITY AND THE DEVELOPMENT OF LANGUAGE
Expérience
Expérience : Syllables and Nonpronounceable Clusters Do Not Appear to Activate Distinct Regions in the Brain: A Functional Magnetic Resonance Imaging StudyExpérience : Human Brain Language Areas Identified by Functional Magnetic Resonance Imaging

Parmi les dyslexiques célèbres, on peut citer Einstein, Rodin, Edison, Pasteur, Andersen et Léonard de Vinci. Léonard de Vinci a d’ailleurs écrit toute sa vie « en miroir ». Quand on voit leur génie, on aurait presque envie d'être dyslexique…

Chercheur : Léonard de VinciChercheur : Renaissance ManLien : Les dyslexiques, des gens doués?
Lien : L'écriture de Léonard de VinciLien : Famous dyslexics

L’un des types d’aphasie les plus rares et les plus curieux est le syndrome de l'accent étranger (« foreign accent syndrome », en anglais). Du jour au lendemain, les personnes qui en sont atteintes (moins de 20 cas rapportés au cours des 80 dernières années) se mettent à parler avec ce qui ressemble à un fort accent étranger. Une femme qui était née et avait vécu toute sa vie à Boston sans jamais avoir voyagé outre-mer ou avoir appris une langue étrangère s’est ainsi retrouvée un bon matin à parler anglais comme si elle avait été d’origine française !

Une analyse acoustique du discours de cette femme a par la suite montré qu’elle ne parlait pas réellement avec un accent français. Elle s’exprimait plutôt avec un trouble de production de la parole qui s’apparentait au niveau du spectre acoustique à l’imitation de l’accent étranger que peuvent faire les comédiens.

De toutes petites lésions dans diverses régions du cerveau pourraient expliquer ces changements subtils de la prononciation (allongement de syllabes, tonalité différente, etc) qui donnent l’impression d’un accent étranger.

Le syndrome de l’accent étranger ne signifie pas qu’il pourrait y avoir dans le cerveau une « zone de l’accent », mais nous donne néanmoins des indications sur la façon dont le langage est produit.

Lien : 'Foreign accent syndrome' explainedLien : The foreign accent syndrome: a reconsiderationLien : A case of foreign accent syndrome without aphasia caused by a lesion of the left precentral gyrusLien : Foreign Accent Syndrome (FAS) Support

Comme un étranger dans son propre pays


Il est difficile de prédire les effets d’une lésion cérébrale sur les facultés langagières des personnes bilingues. L’ordre dans lequel les langues ont été apprises, la facilité d’expression dans chacune des deux langues ainsi que la langue utilisée la plus récemment sont tous des facteurs qui peuvent influencer la récupération d’une ou des deux langues.

On sait par exemple que si le sujet a appris les deux langues en même temps, la lésion affecte habituellement les deux langues de la même façon. Pour des langues apprises à des moments différents, l’une d’elle sera vraisemblablement plus affectée que l’autre.

Lien : The Bilingual BrainLien : The role of cognates in bilingual aphasia: Implications for assessment and treatmentChercheur : Michel ParadisExpérience : Pathological switching between languages after frontal lesions in a bilingual patient
Lien : The Handbook of BilingualismOutil: Différents types de bilinguisme
LES TROUBLES DU LANGAGE
LES LIENS ENTRE PENSÉE ET LANGAGEAPPRENDRE UNE LANGUE

Plusieurs troubles du langage demeurent encore mystérieux ou surprenant. C’est le cas de la dyslexie, l’un des déficits langagiers liés au développement (dysphasies), ou encore de certains types d’aphasies découlant de lésions cérébrales très localisées.

La dyslexie consiste en une difficulté plus ou moins grande à apprendre à lire et à écrire. C’est un trouble du développement que l’on découvre quand l’enfant apprend à lire, vers 6 – 7 ans et qui est plus fréquent chez les garçons et chez les gauchers. Des problèmes de lecture peuvent aussi être acquis suite à une lésion cérébrale à l’âge adulte, auquel cas ils reçoivent plutôt le nom d’alexie.

La personne dyslexique confond différents sons (p et b, f et v) ou des lettres proches visuellement (m et n). Des lettres peuvent aussi leur apparaître renversée (un d vu comme un b) ou même des mots (sac vu comme cas). Dans la dyslexie dite profonde, les patients lisent carrément un mot pour un autre, les deux mots étant liés par le sens (par exemple «vache» à la place du mot «cheval»).

La dyslexie touche 5 % à 10 % des gens dont les autres capacités cognitives sont par ailleurs tout à fait normales. Le degré des atteintes varie beaucoup chez les personnes dyslexiques, allant de légères difficultés de lecture à l'analphabétisme complet.

Le dyslexique peut avoir une expression orale tout à fait normale mais la difficulté commence dès qu'il se trouve en présence des lettres. Mais les caractéristiques de la dyslexie sont sans doute plus étendues qu'un simple trouble de la lecture. Certains la considèrent même davantage comme un problème de traitement sensoriel, d'autres comme un trouble de la mémoire. Tout l’objet des recherches sur la dyslexie est de reconstituer l’enchaînement causal entre certains gènes, certaines zones du cerveau, certaines fonctions cognitives, et l’habileté à lire et à écrire.

On commence ainsi à identifier des signes pathologiques variés dans le cerveau des dyslexiques. Des anomalies évidentes dans la disposition des cellules corticales, plus spécialement dans certaines régions des aires corticales frontales et temporales gauche, ont été par exemple rapportées. Ceux qui ont mis en évidence ces configurations cellulaires inhabituelles dans des régions cérébrales liées au langage considèrent qu’elles se développeraient probablement dès le milieu de la période de gestation, période pendant laquelle on observe une migration cellulaire active dans le cortex cérébral.

Contrairement à la plupart des gens, où le planum temporale gauche est considérablement plus grand que le droit, celui des dyslexique montrerait, selon certains auteurs, une taille comparable. La présence ou l'absence d'une asymétrie du planum temporale dans le cerveau des individus dyslexiques reste toutefois controversée. Lorsque les différences de taille globale du cerveau, d'âge et de sexe sont prises en compte, les différences anatomiques entre le planum temporale des dyslexiques et des témoins s’estompent énormément.

D’autres études suggèrent que des changements dans les voies sensorielles des patients pourraient être responsables de leurs difficultés à lire. Des examens post mortem ont montré que les neurones des dyslexiques étaient plus petits que ceux des témoins dans les aires magnocellulaires du corps genouillé latéral où les neurones étaient à la fois plus petits et agencés de façon désorganisée. Il se pourrait que ces anomalies nuisent au traitement rapide qu’exigent des signaux changeants comme ceux impliqués dans la lecture.

D’autres études chez des dyslexiques, en imagerie cérébrale celles-là, ont pour leur part montré une activation moindre dans l’aire visuelle V5/MT responsable de la détection du mouvement ou dans la partie inférieure du lobe temporal gauche.

Lien : LANGAGE ECRITLien : Evaluation et Soutien de l'Organisation de la Parole et du Langage de l'EnfantLien : Atypical Brain Activity Detected in People with DyslexiaLien : Dr. Sally Shaywitz  - The Brain and Dyslexia - What Brain Imaging Can and Can't Tell Us About Reading DifficultiesLien : Dyslexie : la cognition en désordre ?Lien : Dyslexie: caractères chinois ou alphabet, les désordres cérébraux diffèrent

 

 

Dépendamment de l’ampleur des lésions cérébrales, les aphasies vont de subtiles altérations du discours à la suppression complète de la parole.

L’aphasie globale équivaut à avoir à la fois une aphasie d’expression et une aphasie de compréhension. De vastes lésions au cortex frontal, temporal et pariétal incluant notamment l'aire de Broca, celle de Wernicke et la circonvolution supramarginale conduisent à une perte totale de la capacité de comprendre le langage, de le parler, de lire ou d'écrire.

Ceux qui souffrent d’aphasie globale ne parviennent à prononcer que très peu de mots qui ne sont liés par aucune syntaxe. Ces personnes ont tout au plus une certaine forme de langage automatique, spécialement des exclamations émotionnelles. Les expressions faciales, les gestes des mains et l’intonation vocale peuvent également être préservés. Chez ces patients, le pronostic d'une récupération du langage est néanmoins extrêmement faible.

Dans l’aphasie de conduction, la compréhension et l’expression verbale spontanée sont normales. Ces patients ont toutefois beaucoup de difficulté quand on leur demande de répéter des mots ou des phrases .Quand ils s’y essaient, ils mêlent les sons dans les mots et font de nombreuses transformations et omissions de mots.

La description des lésions cérébrales à l'origine de cette forme d'aphasie est encore controversée. Pour Wernicke, et après lui Geschwind, il s’agit de la destruction du faisceau arqué dans la région pariétale suprasylvienne, faisceau qui relie l'aire de Wernicke à l'aire de Broca. D’autres ont cependant proposé que des dysfonctions corticales, notamment dans le cortex auditif, l'insula et la circonvolution supramarginale, pourraient créer les symptômes de l’aphasie de conduction.

Dans l’aphasie anomique, la principale difficulté consiste à retrouver certains mots, alors que la structure syntaxique durant l’expression verbale est correcte. Ces aphasiques compensent la difficulté à trouver le mot juste par d’autres mots plus vagues (« chose » ou « truc »). Ou encore par des périphrases comme « l’instrument qu’on porte au poignet et qui dit l’heure ». Si on lui une photo de John F. Kennedy, il dira que c’était le président des États-Unis, qu’il a été assassiné, mais ne trouvera son nom que si vous l’aidez en disant « John F… ». La communication avec un patient anomique demeure toutefois possible si l’interlocuteur connaît le contexte ou le sujet de conversation.

L’aphasie anomique est souvent causée par une lésion du lobe pariétal circonscrite dans la région du gyrus angulaire ou juste au-dessus de lui. On lui a aussi associé des lésions à la région du pulvinar dans le thalamus. Comme notre système du traitement du langage forme un réseau densément interconnecté, des dommages un peu partout dans l’hémisphère gauche peuvent être à l’origine d’une aphasie anomique. Cependant dépendamment de la localisation de la lésion, une personne peut être incapable par exemple de nommer un item qu’on lui montre (dû à une déconnexion entre le cortex visuel et le cortex pariétal inférieur) mais sera capable de le nommer s’il le touche ou si on le lui décrit à voix haute parce que ses voies corticales auditive et tactiles le liant au cortex pariétal auront été préservées.

De nombreuses autres formes d’aphasie moins fréquentes ont été décrites. Mentionnons seulement : l’alexie, où le patient est incapable de lire tout en demeurant capable d’écrire, résultat de lésions dans la partie inférieure du lobe occipital et du lobe temporal gauche; l’agraphie, où le patient raisonne normalement, mais il est incapable d'écrire; L’anarthrie où le patient est incapable d'articuler les mots qui pourraient traduire sa pensée suite à un dysfonctionnement du système impliqué dans le contrôle de la réalisation motrice du langage; l’aphasie progressive, qui s’installe insidieusement et amène un manque de mot qui s’accentue peu à peu; l’aphasie sous-corticale, produite par de petites lésions dans les régions sous-corticales de l’hémisphère gauche et qui présente une variété de symptômes rencontrés dans les autres aphasies; l’aphasie motrice transcorticale, caractérisée par des anomalies de l’expression spontanée mais où le patient se distingue de l’aphasique de Broca par sa capacité à répéter de longues phrases, alors que l’aphasique de Broca ne peut répéter que de simples mots; etc.

Enfin, le fait que chacun de ces différents types d’aphasie comporte souvent plusieurs sous-types montre bien toute la complexité des pathologies du langage.

Lien : Troubles du langageLien : Les aphasiesLien : alexie sans agraphieLien : Les aphasiesLien : Mind and Brain


Chez les personnes sourdes qui utilisent le langage des signes, les lésions de l’hémisphère gauche entraînent des déficits du langage comparables à ceux observés chez l’aphasique verbal. Il existe par exemple des cas très proches de l’aphasie de Broca où il devient très difficile pour la personne de parler avec ses mains, mais où ni sa compréhension, ni ses gestes autres que ceux impliqués dans le langage des signes ne sont altérés.

De même, il existe une manifestation de l’aphasie de Wernicke chez les sourds. La personne utilise alors les signes avec facilité, mais se trompe souvent en les faisant tout en ayant de la difficulté à comprendre les gestes d’autrui.

On connaît également le cas très rare d’un homme qui savait parler mais connaissait aussi le langage des signes puisque ses parents étaient sourds. Suite à un accident cérébro-vasculaire à l’hémisphère gauche, il présentait une aphasie globale de laquelle il récupéra progressivement. Fait intéressant, l’homme récupéra sa faculté d’expression dans les deux langues en même temps. D’autres études ont montré le caractère imbriqué des deux régions de l’hémisphère gauche impliquées dans ces deux types de langage, mais également des délimitations un peu différentes.

Outil: La langue des signes
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