|

Plus
de lumière le jour, moins endormi le soir
Rythmes,
douleur et conscience chez les invertébrés
Les
différentes vitesses de notre perception du temps
Trois
modèles à revoir en neurosciences
Lumière,
mélatonine et système immunitaire
Un des apports importants de la
chronobiologie est d’avoir montré que notre organisme ne réagit
pas de la même façon aux médicaments selon l'heure où
ils sont ingérés. Cette idée que l'effet d'un médicament
varie selon le moment de la journée où il est administré
était à peine reconnue au début des années 1980. Cette
discipline a aujourd’hui un nom : la chronopharmacologie. En
tenant compte des cycles circadiens à l’intérieur de l’organisme,
on peut donc conseiller une heure d’administration qui va optimiser les
effets positifs d’un médicament. Des médicaments agissant
sur certaines hormones ne produisent par exemple aucun effet s’ils
sont pris à six heures du soir mais seront parfaitement efficaces
à sept heures du matin. Dans certains cas,
l'heure d'administration du médicament peut aussi diminuer les effets secondaires
et/ou la toxicité du produit. |
Une caractéristique singulière
de notre horloge biologique est d’être indépendante de la température
ambiante. Il s’agit en effet d’un des rares systèmes de notre
organisme à n’être pas ralenti par le froid ou accéléré
par les chaudes températures extérieures. Cette « compensation
pour la température » de notre horloge
moléculaire est fondamentale puisque celle-ci doit conserver
son rythme circadien l’été comme l’hiver. |
| | Les comportements de
presque tous les animaux terrestres suivent des rythmes d'origine endogène.
Ces rythmes sont également modulés par les variations quotidiennes
de lumière et d’obscurité. On appelle ces modifications comportementales
cycliques, auxquelles les humains ne font pas exception, les
rythmes circadiens. Les rythmes circadiens
sont donc des cycles biochimiques, physiologiques et comportementaux qui oscillent
selon une périodicité d’environ 24 heures. Ils sont coordonnés
par un
oscillateur moléculaire situé dans les neurones du noyau
suprachiasmatique. Cette horloge demeure synchronisée avec la l’alternance
du jour et de la nuit par l’entremise de cellules
rétiniennes spécialisées. Ce
processus d’entraînement de notre horloge biologique avec la lumière
du jour est nécessaire parce que le rythme endogène de notre horloge
n’est pas exactement de 24h. En effet plusieurs
expériences en isolement temporel complèt (c’est-à-dire
en dehors de tout repère lumineux ou sonore du moment de la journée)
ont montré que notre cycle naturel se situait plutôt entre 24,2 et
25,5 heures, selon les études. La racine latine du mot circadien (circa,
environ, et dies, jour) prend ici tout son sens, puisque c’est
cet entraînement lumineux qui permet à notre horloge centrale de
suivre avec précision l’alternance
du jour et de la nuit. Cette horloge centrale coordonne
l’activité de
nombreuses horloges situées dans différents tissus périphériques
et possédant eux aussi leurs propres oscillateurs moléculaires.
Voilà pourquoi l’activité de la plupart des grands systèmes
physiologiques de l’organisme fluctue selon le moment de la journée.
C’est le cas par exemple de la température du corps, du niveau des
hormones, de la production d’urine, de la circulation sanguine, du métabolisme
et même de la pousse de cheveux ! Ces
fluctuations passent habituellement par un maximum et un minimum qui coïncident
avec une période particulière de la journée. La température
corporelle est par exemple toujours la plus basse durant la nuit.
adapté de : Gerry WyderBien
sûr, la température de notre corps peut aussi fluctuer selon des
facteurs extérieurs comme le degré d’activité physique,
une infection, un stress ou simplement la température ambiante. Mais si
l'on garde une personne couchée (mais éveillée) pendant une
trentaine d'heures ou plus, on observe également une variation endogène
de sa température. Outre le grand creux de la nuit, notre température
baisse aussi légèrement du début au milieu de l’après-midi.
C’est cette baisse de température endogène, beaucoup plus
que la prise du repas du midi, qui expliquerait la baisse de vigilance et même
la somnolence ressentie à ce moment de la journée.
D’autres
paramètres physiologiques connaissent des fluctuations endogènes
importantes au cours de la journée. C’est le cas de la sécrétion
de plusieurs hormones. La
mélatonine, fabriquée dans la
glande pinéale, est presque indécelable dans
le sang pendant la journée. Elle commence à être sécrétée
en milieu de soirée, à mesure que la lumière diminue, et
atteint son pic de sécrétion entre 2 heures et 4 heures du matin.
|  |
Le
cortisol, dont la sécrétion connaît une pointe
juste avant le réveil, atteint son taux le plus élevé au
lever et contribue ainsi à l'activation générale de l'organisme.
Le
sommeil lent profond, qui survient surtout en
début de nuit, est le moment privilégié de la sécrétion
de l’hormone
de croissance, indispensable pour faire pousser les os et les muscles
des enfants. Chez l’adulte, cette hormone a un rôle important dans
le métabolisme (favorise la synthèse des protéines, aide
à brûler les graisses, diminue la fragilité des os, etc).
La vigilance
et la somnolence sont deux aspects d’un même état fluctuant
dont les variations circadiennes sont divisées en deux sous-cycles d’environ
12 heures chacun. En d’autres termes, les gens placés dans un
environnement dépourvu de repères temporels montrent
un rythme biquotidien de propension au sommeil. La
première et la plus importante période de somnolence
se manifeste autour de l’heure à laquelle on a l’habitude de
se coucher et atteint un sommet entre 3 h et 6 h. C’est l’heure
où le métabolisme et la température corporelle ont leur niveau
le plus bas. La vigilance est au plus bas, on est physiquement maladroit et on
a l’esprit engourdi. Le deuxième pic de somnolence
survient 12 heures plus tard, entre 14 h et 16 h. De moindre importance
que le premier, il est néanmoins bien connu de tous : c’est
le « coup de fatigue » de milieu d’après-midi.
Associé à tort à la digestion du repas du midi, il n’est
pas non plus lié à la chaleur de l’après-midi. Des
études ont en effet démontré la présence des deux
creux dans la courbe de notre vigilance tant chez des sujets vivant sous l’équateur
que chez ceux vivant en Amérique du Nord. La somnolence de l’après-midi
est également ressentie même si on n’a rien mangé à
l’heure du dîner. De plus, chez la plupart des gens, il n’y
a pas de somnolence similaire après le déjeuner ou le souper. Les fluctuations
de notre vigilance dépendent donc bel et bien de notre horloge biologique
interne. Et une courte sieste
l’après-midi serait bénéfique pour la plupart des gens.
| |
|