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Notre
héritage
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sur le cerveau et sa complexité
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sur la nature biologique de notre « esprit »
Le cortex est cette
mince couche de neurones (d'environ 3 mm d'épaisseur)
qui recouvre la surface de chaque hémisphère
cérébral. Le cortex du cerveau humain
est généralement divisé en 3 parties
apparues successivement au cours de l'évolution :
- l'archicortex (ou archeocortex) s'est développé
en association avec le système olfactif; il correspond
au gyrus
dentelé et à l'hippocampe des mammifères
et ne possède pas encore les six couches du néocortex;
- le paléocortex est aussi lié au système
olfactif et n'est pas stratifié en différentes
couches; il correspond au cortex
piriforme et au cortex para-hippocampique;
- le néocortex (ou isocortex) est la portion
du cortex apparue le plus récemment et constitue de
loin la plus grande portion du cortex chez les primates; il
possède une stratification de six couches distinctes
de neurones. |
Au cours de l’évolution,
le cortex cérébral a augmenté de façon
considérable sa surface mais très peu
son épaisseur. On observe ainsi que le cortex
humain est 15 % plus épais que celui du macaque, mais
qu’il a une surface au moins 10 fois plus grande. Comparé à la
souris, l’écart est encore plus marqué :
le cortex de l’humain est deux fois plus épais,
mais environ mille fois plus
étendu ! |
Le cerveau n’a pas
une fonction unique sur laquelle pourrait agir l’évolution.
Il est plutôt une collection de systèmes,
certains diraient des modules, contrôlant chacun des
fonctions différentes. Si on prend les émotions
par exemple, on connaît assez bien les différents
systèmes à
l’origine de la
peur, de la colère ou du dégoût.
Par conséquent, l’évolution a tendance
à agir sur ces systèmes individuellement plutôt
que sur le cerveau dans son ensemble. Il est vrai que l’évolution
a pu jouer en faveur d’une augmentation globale de la taille
du cerveau des primates par exemple, mais reste que son influence
se fait surtout sentir sur des systèmes spécifiques. |
Chez les vertébrés,
la céphalisation s'accroît généralement
en allant des groupes les plus anciens (poisson) aux groupes
les plus récents (mammifères). Chez les invertébrés
cependant, le processus serait davantage lié à la
forme générale du corps, à la diversité
des organes sensoriels, au mode de vie et à la variété
des comportements plutôt qu’à la place du
groupe dans l’arbre phylogénétique.
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UN CERVEAU OÙ LE NOUVEAU SE BÂTIT
SUR L'ANCIEN |
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Le concept du cerveau
triunique proposé par MacLean en 1970 est un raccourci
pratique pour attirer l’attention sur le lourd passé
évolutif de notre cerveau. Mais cette cohabitation
de structures reptiliennes, paléomammaliennes et néomammaliennes
est beaucoup plus intriquée qu’un simple emboîtement
de poupées russes.
Depuis l’avènement des premiers mammifères il y a plus de
200 millions d’années, le cortex cérébral a pris de
plus en plus d’importance par rapport aux autres structures plus anciennes.
Celles-ci ayant fait leur preuve pour assurer certains besoins fondamentaux,
il n’y avait aucune raison pour qu’elles disparaissent et l’évolution
a donc favorisé l’ajout d’annexes et l’agrandissement
plutôt que la reconstruction à partir de zéro.

Les cerveaux de différentes
espèces de mammifères, à
la même échelle à gauche,
et agrandis sans être à l’échelle à droite.
Cet agrandissement de la surface du néocortex
(aussi appelé isocortex) se remarque d’abord chez les
mammifères prédateurs comparés aux herbivores.
Malgré le fait que la prédation soit difficile, la
capture d’une proie constitue un repas de grande valeur nutritive
comparé à la végétation. Or chasser
requiert un système sensoriel et moteur très perfectionné.
Un mammifère ayant un plus grand néocortex se trouve
donc avantagé puisque c’est là que se trouve
les aires sensorielles et motrices.
On observe aussi que la taille du néocortex a pris énormément
d’ampleur chez les primates depuis les petits singes comme
les lémurs jusqu’aux grands singes et aux humains.
Pour plusieurs, cet accroissement du néocortex serait un
reflet de la complexité croissante de la vie sociale chez
les primates. En effet, il semble que la capacité de prédire
le comportement des autres dans un groupe ait constitué un
gros avantage évolutif. L’accroissement de certaines
aires corticales, responsable de compétences sociales comme
le langage, aurait donc été retenu parce qu’il
améliorait cette capacité.
Un autre point sur lequel tout le monde s’entend est que l’augmentation
des circonvolutions du cortex est un facteur important de l’évolution
du cerveau. Ces circonvolutions, en permettant à une plus
grande surface corticale de tenir dans la boîte crânienne,
permettent une meilleure organisation des comportements complexes.
On entend
encore souvent parler des autres animaux comme s’ils étaient
une forme dégradée des humains. Comme s’il
y avait une échelle dans la nature et que tout devait
tendre vers la nature humaine située évidemment
au sommet.
Or ce n’est pas ce que l’on observe. Chaque lignée
a évolué de façon indépendante
et le rat est par exemple parfaitement adapté à son
environnement. Il n’est pas en voie d’extinction
et vit en parfaite harmonie dans son environnement. On pourrait
dire la même chose de la majorité des espèces
peuplant cette planète qui ont pourtant des cerveaux
beaucoup plus petits que le nôtre.

Importance croissante
des aires associatives du rat à l’humain,
en passant par le chat. Aire sensorimotrice en vert;
aire visuelle en rouge, aire auditive en bleu.
Par conséquent le succès, d’un point
de vue évolutif, ne dépend pas de la taille
du cerveau. On sait d’ailleurs que les gros cerveaux
n’ont pas remplacé les petits mais se sont simplement
ajoutés à eux, élargissant ainsi la
distribution des tailles existantes.
D’innombrables petits cerveaux parfaitement adaptés
existent encore de nos jours. Les gros cerveaux qui se sont
développés plus tard sont simplement le fruit
de la tendance intrinsèque de l’évolution
à jouer avec toutes les possibilités. La croissance
de la complexité observée partout dans la nature
ne serait donc pas « l’objectif
» de l’évolution, mais bien un «
effet secondaire » de ses incessantes expérimentations
au fil des millénaires.
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Peut-on dire qu’il existe une relation entre la taille du
cerveau et une certaine « complexité comportementale
» ? Non puisque les cerveaux d’éléphants
et de baleine sont 4 à 5 fois plus gros que le cerveau humain
et que l’on s’accorde tout de même pour dire que
leur comportement est moins complexe que celui des humains.
Pour rendre significative la relation entre la taille du cerveau
et la complexité comportementale, il faut considérer
la taille du cerveau en relation avec la taille du corps de l’animal.
Car une grande surface corporelle demande inévitablement
de plus grandes aires sensorielles par exemple. Or lorsqu’on
pondère pour la taille, on constate qu’il y a effectivement
une relation entre la taille du cerveau et la complexité
des comportements.
Mais plus important encore que la taille du cerveau, ce sont les
différences dans le développement de ses différentes
parties qui vont avoir un effet sur le comportement. Si l’on
prend par exemple le cervelet impliqué dans la coordination
des mouvements musculaires, son poids par rapport au reste du cerveau
est remarquablement constant chez tous les mammifères. À
l’opposé, celui du néocortex varie grandement
selon les espèces. Les poissons et les amphibiens en sont
complètement dépourvus, tandis que le néocortex
représente 20 % du poids du cerveau d’une musaraigne
et… 80 % de celui de l’humain !
C’est durant la transition des primates à l’humain
que le néocortex s’est le plus développé.
Et de toutes les régions du néocortex, c’est
certainement le cortex
préfrontal qui a connu la plus forte expansion chez l’humain.
Les spécialistes
de l’évolution font une distinction entre des
structures anatomiques homologues et analogues.
Deux structures sont homologues si elles ont
une origine embryonnaire et phylogénétique commune.
Ainsi, l’avant-bras d’un humain, l’aile d’un
oiseau ou la nageoire pectorale d’un dauphin sont constitués
des mêmes os hérités d’un lointain
ancêtre commun et sont donc considérés
comme des structures homologues. L’existence même
de structures homologues dans le règne animal est d’ailleurs
considéré
comme l’une
des preuves les plus solides de l’évolution.
À l’opposé, des structures analogues remplissent
les mêmes fonctions chez différentes espèces
qui proviennent de deux lignées évolutives complètement
différentes. On pense par exemple à l’aile
d’un insecte versus l’aile d’un oiseau. Les
deux servent à voler mais n’ont rien en commun
d’un point de vue taxonomique. Les structures analogues
sont le produit de «
l’évolution convergente », c’est-à-dire
des solutions trouvées de manière indépendante
chez des organismes différents pour faire face aux mêmes
contraintes environnementales.
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