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Les études d’imagerie
cérébrale ont permis d’associer le bien-être et l’euphorie
ressentie au début d’une relation amoureuse à l’activation
du système
de récompense dans le cerveau humain. L’expérimentation
animale a par ailleurs montré que l’activation de ce système
de récompense par des moyens pharmacologiques peut réduire substantiellement
la
douleur. En 2010, une étude d’imagerie
cérébrale publiée dans la revue scientifique PLoS One
a testé l’hypothèse que la vue d’une photo d’un(e)
nouvel(le) amoureux(se) pourrait activer les structures cérébrales
du système de récompense et réduire ainsi la sensation subjective
d’une douleur thermique. Les résultats
confirment un effet analgésique ressenti à la vue du partenaire
romantique, analgésie accompagnée effectivement d’une augmentation
d’activité nerveuse dans plusieurs régions associées
au circuit de la récompense, notamment le
noyau accumbens, la tête du noyau
caudé, l’amygdale,
le cortex orbitofrontal latéral et le cortex préfrontal dorsolatéral. |
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DES RÉSEAUX CÉRÉBRAUX POUR DIFFÉRENTS
MOMENTS AMOUREUX | | Les débuts d’une
romance
amoureuse peuvent induire de puissants états d’euphorie. Il s’agit
d’un phénomène présent dans toutes les cultures qui
s’est développé chez nos ancêtres mammifères
pour conquérir et conserver un partenaire spécifique pour la reproduction.
C’est, si l’on veut, le système qui entre en jeu après
l’attirance sexuelle mais avant l’attachement. Les
bases biologiques de l’amour romantique diffèrent de celle du plaisir
sexuel qui enflamme notre hypothalamus.
Elles ont aussi relativement peu à voir avec les émotions, mais
beaucoup avec la motivation et le puissant désir de récompense impliqué
dans l'amour humain. Les premières études
d’imagerie cérébrale sur le sentiment amoureux, comme celle
de Bartels et Zeki en 2000, démontraient déjà qu’il
existe une signature particulière de l’activité cérébrale
à la vue de l’être aimé qui est distincte de celle provoquée
par la vue de simples ami(e)s. Chez ces sujets qui
regardaient la photo de la personne avec qui ils étaient en relation amoureuse
depuis environ deux ans, une activité neuronale accrue
était identifiable dans la partie médiane de l’insula,
dans le cortex
cingulaire antérieur, dans le
noyau caudé et le putamen (bilatéralement pour toutes ces structures).
À l’opposé, une baisse
d’activité était observable dans les deux cortex
cingulaires postérieurs et les deux amygdales,
ainsi que dans les cortex préfrontaux, pariétaux et temporaux médians
de l’hémisphère
droit seulement. En 2005, une autre étude
d’imagerie cérébrale faite avec des personnes nouvellement
en amour (de 1 à 17 mois) a obtenu des résultats similaires, c’est-à-dire
ici une activation de la partie postéro-dorsale droite du noyau
caudé et dans la partie droite de l'aire tegmentale ventrale.
Ces deux régions étant associées au circuit
de la récompense, elles sont riches en dopamine
et contribuent donc fortement à la motivation des comportements. Par
rapport à l’étude publiée en 2000, celle-ci portait
plus spécifiquement sur les premiers mois de la relation amoureuse et a
permis de révéler des corrélations intéressantes :
- celle entre le niveau d’activation de
l’aire tegmentale ventrale gauche et l’évaluation subjective
de la beauté du visage;
- celle entre
l’activité du noyau caudé antéro-médian droit
et l’intensité de la passion romantique évaluée par
un questionnaire;
- et celle entre l’activation
dans l’hémisphère gauche de l’insula, du putamen et
du globus pallidus avec l’intensité de l’affect ressenti.
Pris
globalement, ces résultats confirment que l’état amoureux
s’apparente davantage à un état motivationnel orienté
vers un but (comme la faim, la soif ou la dépendance
à une drogue) qu’à une émotion. Cela aide aussi à
comprendre pourquoi le fait d’être en amour affecte notre comportement
si profondément, surtout dans les premiers temps. Et pourquoi une rupture
amoureuse peut affecter notre moral à ce point. Toutefois,
au fur et à mesure que la relation amoureuse s’approfondit, les études
d’imagerie cérébrale suggèrent que l’activité
associée au circuit de l’amour romantique s’altère légèrement
et, dans certains cas, on voit s’activer des régions du cerveau associées
à l’attachement à long terme. Comparées
aux personnes en amour depuis quelques semaines, celles qui l’étaient
depuis plus d’un an montraient une activité significativement accrue
dans une région liée au sentiment d’attachement, le globus
pallidus.
En 2011,
Acevedo et ses collègues ont cependant montré que lorsqu’on
présente à des individus une photo de leur conjoint de qui ils se
disent toujours intensément amoureux après plus de dix ans de vie
commune, on note une activation cérébrale dans l’aire
tegmentale ventrale (VTA) et dans la substance
noire (SN) (voir l’image ci-contre), deux régions associées
à une récompense et riches en dopamine (qui ne s’activent
pas à la vue d’une simple connaissance). L’aspect motivationnel
de l’amour romantique semble donc pouvoir coexister, dans une certaine mesure,
avec les transformations cérébrales liées à l’attachement
qui se développent avec le temps. | 
(Source : Acevedo
et al., 2011)
| En
2004, Bartels et Zeki ont pour leur part comparé les corrélats neuronaux
de l’amour romantique et de l’amour maternel. Ils ont pu constater
que les deux activaient des régions qui leur étaient propres, mais
qu’il y avait également une correspondance étroite entre certaines
régions activées par les deux : le cortex cingulaire antérieur
(l’interface cognitive avec le système limbique), l’insula
(l’interface sensorielle avec le système limbique), et le striatum.
Détail intéressant, ces structures activées à la fois
par l’amour romantique et maternel sont toutes riches en récepteurs
à
l’ocytocine et à la vasopressine, des hormones qui jouent un
rôle dans l’attachement. Par ailleurs,
l’amour romantique et maternel diminuent tous deux l’activité
cérébrale dans un ensemble commun de régions associées
avec les émotions négatives, les jugements sociaux et l’attribution
d’états mentaux. Pour les auteurs de l’étude, cela montre
que l’attachement humain semble amoindrir une certaine prudence sociale
normalement de mise en désactivant les circuits qui lui sont normalement
nécessaires. |
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