Capsule histoire : Quand l'histoire des sciences éclaire la philosophie de l'esprit

Les métaphores avec des événements de l'histoire des sciences sont fréquentes en philosophie de l'esprit. Pour montrer comment l'aspect phénoménal des choses pourrait être une caractéristique originale de la matière, les dualistes de propriété évoquent par exemple la découverte de l'électromagnétisme au XIXe siècle. On aurait bien voulu décrire l'électromagnétisme à partir d'éléments connus, disent-ils, mais on a dû reconnaître qu'il s'agissait d'une nouvelle caractéristique de la nature.

Les matérialistes ont aussi eu recours à la physique du XIXe siècle pour appuyer leurs dires en prenant l'exemple de la température. Au lieu de faire intervenir une nouvelle composante de la réalité pour en rendre compte (comme la force électromagnétique), la température fut expliquée dans les termes d'entités mécaniques encore plus simples : l'énergie cinétique moyenne. La température continue donc d'exister pour le commun des mortels, mais on sait maintenant qu'elle correspond à l'agitation moléculaire moyenne. Les matérialistes appliquent donc cette même logique à la conscience : les états conscients existent mais pas comme quelque chose en extra par rapport à l'activité cérébrale.

Un autre parallèle que les matérialistes font souvent est de comparer le discours d'aujourd'hui sur la conscience avec celui sur l'essence de la vie au début du XXe siècle. À l'époque, les vitalistes affirmaient que les organismes vivants possédaient une force intérieure particulière (appelée énergie ou élan vital) qui leur conférait les propriétés du vivant. Les matérialistes s'opposaient à cette vision des choses en arguant que les lois de la physique et de la chimie pouvaient expliquer à elles seules les caractéristiques des organismes vivants.

Or il s'est avéré que les mécanismes de la vie pouvaient effectivement être décrit en terme d'interactions moléculaires sans recours à quelque force vitale que ce soit. Malgré les nombreux modèles neurobiologiques de la conscience proposés depuis le début des années 1990, on ne peut affirmer avec certitude qu'une telle réduction va également s'opérer pour la conscience quand nous connaîtrons mieux le fonctionnement du cerveau.

Ceci dit, il se pourrait bien que la question "Qu'est-ce que la conscience ?" quitte éventuellement le devant de la scène, à mesure que nous distinguerons ses diverses composantes. Un peu comme la question "Qu'est-ce que la vie ?" finit par être de moins en moins souvent posée à mesure que les biologistes détaillèrent empiriquement ses mécanismes moléculaires.

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